Focus : Les grandes recettes phares préparées à la foire
1. La lamproie à la bordelaise : un plat événementiel
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La star des rivières : La lamproie, poisson serpentiforme, était pêchée en Garonne et Dordogne dès février. Difficile à cuisiner (elle doit être vidée, écorchée et saisie dans son propre sang pour la sauce), elle était réservée aux grandes occasions.
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La recette classique comporte :
- 1 lamproie de 1,5 à 2 kg
- 1 bouteille de vin rouge de Bordeaux
- Poireaux, oignons frais, ail, bouquet garni
- Croûtons dorés au beurre
- Un soupçon de jambon et de lard maigre
La lamproie est découpée vivante, puis mijotée longuement avec légumes, vin et sang récupéré, le tout lié à la dernière minute. Selon les témoignages du XIXe siècle, une marmite pouvait nourrir 20 à 30 convives les jours de foire (Archives municipales).
2. Les tourtes de gibier et la pie bordelaise
La pie bordelaise était une tourte généreuse, mêlant pigeon, bécasse, ou lièvre à du foie gras, avec parfois des champignons des bois. Ces préparations robustes séduisaient les négociants qui bravaient la froidure pour assister aux foires de novembre et décembre. On trouve des variantes dans les recueils de recettes du XVIIIe siècle conservés à la Bibliothèque municipale de Bordeaux.
3. L’entrecôte à la bordelaise et ses dérivés populaires
Célébrée lors des foires aux bestiaux sur les quais, l’entrecôte était grillée à la braise et servie avec une réduction d’échalotes confites dans le vin. Les bouchers bordelais organisaient des concours, défiant les Parisiens qui revendiquaient la paternité de la sauce bordelaise. Astuce des chefs forains : on utilisait la moelle médicinale, abondante et bon marché lors des grandes foires d’abattage.
4. Les anguilles et poissons d’estuaire
Les pêcheurs installaient de vastes bassins sur la foire Saint-Michel, débordant d’anguilles, d’esturgeons, d’aloses. L’alose, grillée ou préparée au vin blanc, s’invitait sur les étals dès avril. L’esturgeon, jadis poisson courant de la Gironde, se dégustait en matelote, parfois fumé, et donnait, luxe suprême, le caviar bordelais (source : Musée Mer Marine).
5. Les douceurs sucrées : du canéjule au cannelé
- Canéjules : Petits gâteaux à pâte de pain, parfumés au rhum, recouverts de sucre fondu, très présents au XIXe siècle.
- Noisettines du Médoc : Toquées dans le sucre chaud, ces noisettes se vendaient dans de ravissants cornets colorés (voir sources : Les douceurs girondines, Sud-Ouest Gourmand).
- Puits d’amour de Captieux : Petits choux fourrés à la crème, proposés lors des foires agricoles du sud Gironde.