L’impact social et économique d’un commerce mondial
L’installation des raffineries de sucre, de chocolateries (la première, La Maison Darricau, est encore une institution), mais aussi l’ouverture de boutiques d’épices dès le XVIII siècle témoignent de l’essor d’un véritable écosystème alimentaire.
- La maison Baillardran, figure incontournable du canelé, ne serait pas née sans la tradition du sucre importé via le port.
- De nombreuses familles bordelaises ont bâti leur fortune sur le commerce du sucre, donnant naissance à une bourgeoisie du sucre qui a stimulé le mécénat dans l’art, l’architecture et la gastronomie – les grandes demeures du XVIII siècle dans le quartier des Chartrons sont un héritage tangible.
Par ailleurs, cette histoire s’inscrit au cœur d’une réalité plus sombre : celle de la traite négrière et de l’économie coloniale. Les échanges triangulaires entre Bordeaux, l’Afrique et les Antilles, parfois désignés comme le “commerce infâme”, reposaient en grande part sur l’exploitation de femmes et d’hommes réduits en esclavage (L’Humanité, Le Monde, Mémoires de la traite – Bordeaux Port d’attache).
- En un siècle, près de 500 expéditions négrières ont été recensées au départ de Bordeaux, et plus de 150 000 Africains ont été déportés vers les colonies (Source : Wikimedia France).
Ce pan complexe de l’histoire a laissé, dans la culture et la gastronomie bordelaises, des paradoxes dont on sent parfois encore le goût sucré-amer.